Dimanche Investigations (II)
(Partie 2/2) (Images de la Bunka Gakuen Costume Museum Digital Library)
Mais au fait, que porte-t-on sous une robe à zone ?
Avant de commencer, je tiens à préciser que j'ai fait cette analyse avec les données que j'avais sous la main et que je pouvais comprendre, soit deux magazines français allant de fin 1785 à fin 1789, période où l'on porte caracos et robes à zone. J'ai de bonnes raisons pour ces limitations.
D'abord, la mode au XVIIIe s'initie en France, donc les magazines anglais et allemands s'inspirent de ces mêmes magazines que j'ai étudiés, ce serait redondant de les citer aussi.
Ensuite, je cherche à prouver si un type de vêtement existe ou pas, de quelle manière il se porte, à quelle fréquence. Si ce données existent en France, je n'ai pas besoin des magazines étrangers pour me "prouver" que ouioui, cela existe. Cela me prouverait uniquement si cette mode est aussi présente à l'étranger. Ce serait tout aussi intéressant à faire, mais ma recherche d'une semaine, en prendrait facilement trois ou huit. Mais c'est une idée à continuer de creuser.
Enfin, je ne maîtrise pas (plus) l'allemand, et l'anglais, malgré toute ma bonne volonté, n'est pas une langue naturelle pour moi. Les subtilités d'une langue sont difficiles : comme on le verra, même en français le vocabulaire de la mode peut poser problème, alors imaginez l'allemand ou l'anglais dont je ne connais pas, ou mal, les particularités langagières du XVIIe siècle.
Au mieux donc, cette recherche est imparfaite, au pire, réductrice, mais j'assume ce choix. Je ne fais pas une thèse, même si ce serait fascinant (pour une dizaine de personnes sur la planète). Juste un éclaircissement. En même temps (et c'est peut-être un peu contradictoire pour vous -- pour moi, non), comme j'ai passé beaucoup de temps sur cette recherche, que c'est mon blog, que j'y poste ce que je veux de la manière que je veux, et bien je vais être hyper-exhaustive et poster TOUT ce que j'ai trouvé. Du coup, je vous l'accorde, c'est un post interminable. Vous avez ma permission de sauter deux-trois photos. Mais si vous sautez les plus intéressantes, c'est votre problème...
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J'étais de toutes façons partie dans cette recherche avec un à priori important. Pour moi, il n'existait que deux possibilités : soit une pièce d'estomac, soit des pans ou "compères", directement attachés sous la partie à zone. Je n'ai pas inventé cette affirmation, je la basais sur mon observation de pièces encore conservées dans les musées : on n'y trouve en effet que ce type de robes et de caracos (plus rarement ceux avec pièce d'estomac séparée qui d'ailleurs a souvent disparu) Ou en tout cas, pour les pièces de musées connues du public.
(Il existe au moins quatre caracos que je connaisse qui sont visiblement fait pour être mis par dessus une robe-chemise, une corsage ou un corset. Les basques en sont très rejetées en arrière. Je n'ai pas toutes les photos sous la main, du coup je ferais peut-être un post spécial un autre jour. Mais je ne les ai pas assez examiné (quand c'est possible avec le zoom par exemple) pour dire s'ils étaient construits ainsi à l'origine ou manipulés par la suite. Les manipulations pouvant être XIXe : pincettes...)
(Il existe au moins quatre caracos que je connaisse qui sont visiblement fait pour être mis par dessus une robe-chemise, une corsage ou un corset. Les basques en sont très rejetées en arrière. Je n'ai pas toutes les photos sous la main, du coup je ferais peut-être un post spécial un autre jour. Mais je ne les ai pas assez examiné (quand c'est possible avec le zoom par exemple) pour dire s'ils étaient construits ainsi à l'origine ou manipulés par la suite. Les manipulations pouvant être XIXe : pincettes...)
Voici quelques exemples de Musée ou collections semi-privées.
Compères attachés
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(patron Janet Arnold pour l'avant dernière robe : le livre où il est publié est quasi introuvable. Je l'ai acheté au Japon. Il existe une version française épuisée depuis longtemps. Si vous avez des questions au niveau du texte japonais, je peux en restituer les 3/4 pour les curieuses, ayant aussi vue la version française il y a des siècles -- merci la BNF. Y'aka demander)
Pièce d'estomac
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Puisque j'avais entamer cette recherche pour savoir au départ si les robes fourreau existaient et si, le cas échéant, on en trouvait sous les robes à zone, c'est sur ce premier point que je me suis concentrée. Pour un résultat surprenant : oui, ça existe, mais on n'en trouve jamais JAMAIS sous les robes à zones. Même pas un seul exemple pour faire plaisir. Pourtant, en y réfléchissant, il m'est apparu que c'était assez logique. Les robes à zones sont des robes très versatiles : on mélange les couleurs, on change de jupon pour donner un coup de frais à la robe. Si on mettait une robe d'une seule pièce en dessous, il faudrait tout changer en même temps : les manches, le corsage, le jupon. Ce n'est pas dans l'esprit de la robe à zone tel qu'il ressort des magazines que j'ai lus.
J'ai ensuite cherché la mention des robes faites avec les compères intégrés, ces robes de musées que tout le monde connait. Et là aussi, néant. Rien. Comme si ça n'existait pas ! C'est là que l'on voit la limite des magazines de mode. Au mieux, il y a une admission tacite de l'existence de ce type de robe par l'omission. Il existe des robes où il n'est juste jamais fait mention de ce qui se trouve sous la zone. Au lecteur de deviner. Mais les exemples, sur 4 ans 1/2, sont si peu nombreux que l'on peut honnêtement se demander s'il ne s'agit pas d'un bête oubli à chaque fois. D'autant plus que la ressemblance avec certains autres dessins, qui eux sont clairement labellisés, est parfois frappante.
Une autre possibilité, mais que je ne peux étayer par rien, si ce n'est la surabondance de mentions de pièces d'estomac, c'est que celles-ci sont peut-être parfois, sans que ce soit jamais mentionné, des compères attachés. Le fait est que le terme "compères" n'est jamais utilisé dans ces années-là, et que c'est un terme qui date de l'époque de la robe à la française (apparition vers 1760 sur les françaises). Peut-être n'a-t-il pas survécu comme le mot "pièce d'estomac", peut-être était-il vieilli, peut-être étaient-il plus connoté robe à la française, alors que "pièce d'estomac" était plus neutre ? Une pièce d'estomac est censée être un triangle d'une seule pièce détachable et interchangeable à volonté. Les compères, eux, sont deux rabats inamovibles, cousus à la robe, qui s'épinglent ou s'accrochent l'un à l'autre sur le milieu devant (jamais entendu parlé de compères détachable. (Addenda : bon ben alors, il y a probablement celle-là, en fait.) Par contre, j'ai vu des pièces d'estomac qui sont des compères en trompe-l'oeil). Mais peut-être est-ce notre vision moderne qui est trop réductrice ? Encore une fois, c'est difficile d'en avoir le coeur net.
Cabinet des Modes, Mai 1786
Magasin des Modes, Juillet 1787
Magasin des Modes, avril 1788
Magasin des Modes, Décembre 1788
Magasin des Modes, Janvier 89
Magasin des Modes, Mai 1789
Magasin des Modes, Novembre 1789
Il y a même cet exemple étonnant, avec des basques de partout de différentes couleurs :) Cet exemple-là est clairement un oubli dans la description. Ah là là ! Les XVIIIe, ça peut être moche, des fois...
Magasin des Modes, Mai 1789
(description redondante pour les deux robes)
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Ceci établi, arrivons-en à ce qui se met donc sous la zone d'après le Cabinet des Modes (fin 1785-1786) et le Magasin des Modes (1787-1789). Le Magasin des Modes a ceci de particulier qu'il décrit souvent des vêtements en ventes dans des magasins dot ils précisent l'adresse. Donc ces descriptions sont souvent basées sur des robes réelles.
Il ressort de cette analyse que l'on peut mettre trois types de soubreveste (terme trouvé dans une gravure 1770-80 : le terme est cité par Maurice Leloir et Madeleine Delpierre, sans jamais donner la source... Et ce sont des chercheurs "de référence" : mon c.. ! Le terme soubreveste est plutôt un terme d'habillement militaire) : un corsage, un corset et une pièce (comprenez pièce d'estomac). Jamais aucun de ces termes n'est défini clairement, à nous de piécer nos connaissances XVIIIe pour nous faire une idée. Le problème étant qu'en ce qui concerne "corsage" et "corset", les mots ont des usages multiples et parfois, contradictoires.
Il ressort de cette analyse que l'on peut mettre trois types de soubreveste (terme trouvé dans une gravure 1770-80 : le terme est cité par Maurice Leloir et Madeleine Delpierre, sans jamais donner la source... Et ce sont des chercheurs "de référence" : mon c.. ! Le terme soubreveste est plutôt un terme d'habillement militaire) : un corsage, un corset et une pièce (comprenez pièce d'estomac). Jamais aucun de ces termes n'est défini clairement, à nous de piécer nos connaissances XVIIIe pour nous faire une idée. Le problème étant qu'en ce qui concerne "corsage" et "corset", les mots ont des usages multiples et parfois, contradictoires.
L'usage du corsage est ce qui revenait le moins souvent au cours de mes recherches. Première interrogation : qu'est-ce que le corsage ? Le corsage, au départ est le terme historique qui désigne la partie haute d'une Robe à l'Anglaise. Ce n'est pas juste un terme moderne (ouf !)
De manière générale, le corsage semble avoir été un effet de mode de l'année 1787. Un seul exemple en Juin 1788, puis il disparaît. La première mention le compare aux gilets ou les vestes que l'on porte sous les robes à zones. Étonnante précision, puisqu'on n'a justement que de très vagues allusions aux vestes et aux gilets, on en reparlera.
De manière générale, le corsage semble avoir été un effet de mode de l'année 1787. Un seul exemple en Juin 1788, puis il disparaît. La première mention le compare aux gilets ou les vestes que l'on porte sous les robes à zones. Étonnante précision, puisqu'on n'a justement que de très vagues allusions aux vestes et aux gilets, on en reparlera.
Magasin des Modes, Juin 1787
Le problème, donc, est de ne pas confondre le corsage de la robe et le corsage en dessous :/ D'autant plus qu'ils n'ont pas forcément les même caractéristiques : les corsages de robe ont des manches de même couleur et se ferment sur l'avant alors qu'à une seule exception, les corsages de dessous n'ont pas de manches visibles, donc probablement pas de manches du tout.
Magasin des Modes, Novembre 1787
Cet exemple est intéressant, car c'est une robe-chemise à zone : un summum de laideur :) Le corsage vert-pomme a des manche visibles en dessous. Le jupon "transparent" * de dessous est aussi vert pomme. C'est le plus proche que l'on puisse trouver d'un ensemble fourreau sous une zone. Et pourtant, la description les décrit bien chacun de leur côté, comme deux pièces séparées.
( * NB : Revient très souvent dans les magazines un usage dont les costumières modernes devraient s'inspirer : le transparent. Attention, le terme "transparent" à inverser son sens en français moderne. Actuellement, c'est un mot qui signifie "voir à travers", un objet est transparent et laisse voir ce qui est en dessous. Mais le vrai sens de "transparent", c'est qui est "apparent à travers", l'objet du dessous qui est visible sous l'objet du dessus. Donc un transparent, dans un magazine du XVIIIe,, c'est un vêtement opaque qui transparaît sous un vêtement au tissage léger, comme de la mousseline. Très très très très très courant, ce sont des vêtements de couleur très flash vert pomme comme ici, ou très souvent, rose.)
( * NB : Revient très souvent dans les magazines un usage dont les costumières modernes devraient s'inspirer : le transparent. Attention, le terme "transparent" à inverser son sens en français moderne. Actuellement, c'est un mot qui signifie "voir à travers", un objet est transparent et laisse voir ce qui est en dessous. Mais le vrai sens de "transparent", c'est qui est "apparent à travers", l'objet du dessous qui est visible sous l'objet du dessus. Donc un transparent, dans un magazine du XVIIIe,, c'est un vêtement opaque qui transparaît sous un vêtement au tissage léger, comme de la mousseline. Très très très très très courant, ce sont des vêtements de couleur très flash vert pomme comme ici, ou très souvent, rose.)
Quant à savoir si les corsage de dessous se ferment devant ou derrière, ce n'est jamais précisé. S'il faut en croire les gravures, et le peu qu'on voit des corsages, je dirais qu'ils se nouent derrière. L'un des corsages présente sur le devant "deux rangs de très larges boutons", mais il n'est pas dit si ils ferment le corsage. Je pense qu'il sont uniquement décoratifs, sinon, le contraire serait mentionné.
Par deux fois, les zones se ferment ("se lient") grâce a des ganses à boucles sur le devant, ce qui est une fermeture frontale qui avait beaucoup de succès. Mais c'est une formulation ambivalente à chaque fois : c'est le corsage qui est lié et non la robe. Ce sera pareil avec les corsets et les pièces d'estomac (deux exceptions où c'est clairement la robe qui est fermé par les ganses). Est-ce la robe qui est liée-fermée par les ganses et la partie du dessus est est retenue en place par elles, ou le corsage est-il lié-décoré avec ? La première version me semble la plus logique, surtout que lorsque la taille est nouée d'une ceinture, ils utilisent aussi le terme "lié". Mais je n'écarte pas du tout la deuxième possibilité. L'art de la décoration vestimentaire en 1780 n'a pas de limite.
Les corsets. Pfff. Vaste programme. Déjà, qu'est-ce que c'est qu'un corset ? Que dit aujourd'hui l'Académie française ?
C'est le problème avec le mot corset, c'est difficile à définir. Ca l'est encore plus au XVIIIe siècle. Pour moi un corset, c'est d'abord une pièce de vêtement baleinée dont le but est de conformer le corps. Lui donner une forme, un silhouette considérée comme belle ou socialement acceptable (gommer les bourrelets par exemple, souligner la taille, les hanches, la poitrine, etc.). Par ailleurs, le corset offre le soutien nécessaire au corps féminin. Et il conforme le corps pour une forme voulue par les critères de "beauté" de l'époque. Je n'aime pas beaucoup cette expression. Ce ne sont pas forcément des critères de beauté, plutôt que des critères correspondant à ce que le corps social a décidé être la forme correcte. Et accessoirement, le corset sert à resserrer la taille. Ou, je sais : accessoire ? Couper le souffle n'est pas le but premier du corset, par contre la recherche d'une silhouette parfaite en passe souvent par une taille resserrée. Mais ça ne signifie pas forcément qu'il faille opter pour le tight-lacing.
Au XVIIIe siècle, qu'est-ce qui correspond à cette notion moderne de corset ? Pas ce qui porte l'appellation "corset" en tout cas. Le problème, c'est qu'il existe beaucoup de types de "corsets" au XVIIIe.
Le nom correspondant à notre notion de corset est en fait appelée le "corps". Corps baleiné, Corps piqué, ou Corps de Cour selon l'usage. Au XVIIe, le Corps apparaît sous cette forme spécifique en tant que vêtement de Cour. La forme du Corps est décidé par décret par Louis XIV. Il est protocolaire (typiquement Versaillais). Il n'est pas "de mode", il est politique. Il ne bougera pas jusqu'à Marie-Antoinette qui réussira à en réduire partiellement l'usage parce qu'elle ne le supporte pas (physiquement). C'est un corset très baleinée, très douloureux et insupportable à porter sur le long terme (d'après tous les témoignages d'époque. A part la Princesse Palatine, personne n'aimait le costume de Cour). Par ailleurs, le Corps de Cour est un vêtement "extérieur". Il est fait pour se voir. (Deux exemples de Robes et de Corps de Cour)
Tout ça pour souligner que le "corps" de base au XVIIIe est un objet parfaitement artificiel qui n'a pas son équivalent dans l'Histoire de la Mode : aucune autre Cour n'a inventé un corps similaire (elles se sont contenté d'importé le corps de Cour français) et on n'a jamais inventé plus contraignant plus tard.
Le Corps baleiné (ou couvert) et le Corps piqué (la seule différence est que les coutures de baline du corps piqué sont visibles, d'après l'Encyclopédie Diderot et d'Alemebert) est son équivalent civil. S'il est beaucoup plus facile à porter, il reste complètement baleiné. A la différence du Corps de Cour, c'est un sous-vêtement, il est visible au début sous la Robe à la française, mais finit par devenir totalement invisible, caché par une pièce d'estomac.
Ces deux types de Corps sont caractéristiques des trois premiers quarts du XVIIIe, parce qu'ils sont très formels, et ils sont chers (longs et difficiles à fabriquer). On a des exemples plus populaires du Corps baleinés, mais ils sont souvent datables de 1750 au mieux. Ils sont aussi principalement dans des collections anglo-saxonnes.
(NB : Je n'ai jamais vu de Corps populaires dans des expos françaises. Il peut y avoir plusieurs raisons à ça : pas assez glamour (si c'est pas glamour, c'est pas assez bien pour être exposé en France), pas assez de pièces conservées, pas assez de connaissances, pas de pièces de qualité montrables, pas envie de dépenser de l'argent pour acheter des pièce "pauvres" pour les ajouter aux collections, etc. Aux USA, par exemple, la majorité des colons ne sont pas riches (et n'en ont pas honte) et les vêtements sont souvent importés, donc chers : on conserve plus longtemps par économie. En France, la mentalité est différente : les pauvres n'avaient pas forcément la même envie, ni le même besoin de conserver les vêtements. Par ailleurs, il y a la notion de memorabilia : on conserve des souvenirs par admiration pour l'époque vécue, ce qui colle très bien pour l'époque coloniale américaine. En France, on a conservé un nombre étonnant d'objets parfois tous simples liés à la Révolution, dans cette même optique. Mais pour le XVIIIe, il y a une focalisation sur les objets précieux.)
La question des Corps se diversifie pas mal sur la suite et lorsqu'on regarde dans l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert (1776), on trouve pas mal de Corps différents, dont celui pour femme enceinte et pour l'équitation. On y trouve aussi la première et peut-être la seule explication de ce que peuvent être les Corsets. Il s'agit du fameux corset blanc, non baleiné à l'exception de deux busc. Les buscs, en l'occurrence, ce seront des baleines du chaque côté de la fermeture avant (les buscs par définition sont toujours sur l'avant).
Il n'en précise pas l'usage. On ne peut donc que conjecturer sur l'usage du Corset en XVIIIe. Il est très utilisé en Provence, où le Corps, lui, est minoritaire. On peut au moins essayer de déduire de cette information qu'il est d'un usage répandu dans le peuple. En Provence, c'est aussi un vêtement visible, pas un sous-vêtement, comme le Corps. On peut supposer qu'il était utilisé en négligé par les bourgeoises et les aristocrates (le public de nos magazines de mode). S'il s'agit d'un vêtement de négligé, il était aussi un vêtement visible. L'Encyclopédie traitait de tous et pour tous, la présence du corset blanc dans ces pages n'est donc pas une indication d'un usage précis pour les couches supérieures de la société. Juste une indication que ce type de vêtement existe, ce qui ne nous avance pas énormément.
Il fournit aussi un patron de ce corset, et ce patron (fig 2, 3, 4, 5, 6, 7. Les figures 6 et 7 représente probablement le tissu extérieur du corset et le "patron", tel que l'intitule Diderot, est la doublure, fig 4 et 5) nous fournit un certain nombre de détails très intéressantes pour notre sujet : le corset blanc peut se lacer devant ou derrière et il a des basques caractéristiques (les languettes du bas qui seront découpées).
Il s'agit du Corps à l'Anglais (fig 1, 2, 3, 4, 9, 10, 11, 12). Il n'a pas la même forme que le Corps à la Française qui est les patron le plus utilisé par les reconstituteurs actuellement. Il n'a de toute évidence une forme aussi rigide qu'un Corps de Cour normal. Il est utilisé ici pour un Costume de Bal, et tout comme le Corset de Cour, n'est pas utilisé comme une pièce de sous-vêtement.
Un corset qui est comparé à un gilet ou interchangeable avec un gilet. Là encore, les manches sont optionnelles ou invisibles. Les basques ont disparu. Ces exemples sont intéressants, parce qu'il offrent une autre définition possible du mot "corset" : un simple gilet sans manches. Il existe plusieurs exemples de ce type, utilisé pour les robes de grossesse (Ensemble de Colonial Williamsburg et ensemble du Met Costume Institute) : les deux s'utilisent comme vêtement de dessous, se ferment devant avec un laçage d'ajustement dans le dos. Par contre, ces deux exemples sont taillés pour permettre de couvrir un ventre de grossesse, leur usage laisse peu de doute. Mais il n'est pas difficile d'imaginer un gilet similaire à porter en dehors des grossesses.
Des corsets au manches de même couleur que le corset (et de couleur différente de la robe) -- en ne prenant en compte que ceux qui mentionnent clairement que les manches appartiennent au corset. Pas de basques, pas de mention de la fermeture devant ou derrière. Seule particularité : les manches peuvent en être longues. C'est la première fois que je vois des corsets associés à des manches longues. J'aurais tendance à rapprocher ces exemples-là des corsages mentionnées plus haut.
Les autres exemples de corsets n'apportent aucune précision.
Pour finir, l'élément qui revient le plus souvent sous les zones : la pièce (d'estomac). J'ai déjà mentionné que je croyais possible qu'une partie de ces pièces ne soient pas autre chose que des compères attachés aux zones, ce qui module un peu cette surabondance. Si l'on veut faire des statistiques, j'ai trouvé 33 pièces contre 24 corsets (qui, on l'a vu, peuvent être plusieurs types de vêtement différents) et 6 corsages, contre une quasi exclusivité de compères attachés pour les robes conservées. Je parierais que, comme pour les corsets, ces "pièces" peuvent aussi signifier autre chose que juste des pièces d'estomac classiques.
Les pièces sont rares en 1786 et 1787, mais très fréquentes en 1788 et omniprésentes en 1789, où elles ont remplacées tout le reste. On peut essayer d'y voir un retour vers la simplicité, avec des pièces d'habillement moins encombrantes, moins de tissu à utiliser, etc.
Dans quelques cas, les manches sont assorties à la pièce d'estomac : en toute logique, soit le vêtement est tout d'une pièce, pour éviter le risque de dépareiller la pièce, ou ce n'est pas vraiment une pièce mais un corset à manches. Il est même mentionné une fois qu'il est possible d'interchanger pièce et corset. Il est donc évident que dans ces cas-là, la partie de dessous est amovible.
Je dirais également que les pièces qui sont retenues ("liées", "lacées") par des rubans ou des ganses, sont de vraies pièces d'estomac amovibles. C'est ce qui me semble le plus logique. (Je parle ici des pièces où le laçage est mentionné dans le texte, dans deux des exemples précédents, ils n'est pas décrite, mais visible sur les gravures. Cela peut-être un ajout du graveur.)
Si vous êtes arrivés à la fin de cet article, félicitations !
Je voudrais rappeler en conclusion que ces données sont exclusivement extraites de magazines de modes, et donc à traiter avec la distance nécessaire. On ne peut pas utiliser au pied de la lettre de telles information, et les comparaisons que j'ai essayées de dresser avec des vraies pièces d'époque montre à quel point le gouffre entre les sources écrites et la réalité pouvait être important. Néanmoins, sur le fond, l'analyse de ces documents dessine en partie les habitudes de l'époque, et en cela est, à mon avis, un outil indispensable.
En tout cas, moi, maintenant, j'ai vraiment envie d'essayer de créer une robe à zone par dessous un Corset blanc :)
Magasin des Modes, Juillet 1787
Par deux fois, les zones se ferment ("se lient") grâce a des ganses à boucles sur le devant, ce qui est une fermeture frontale qui avait beaucoup de succès. Mais c'est une formulation ambivalente à chaque fois : c'est le corsage qui est lié et non la robe. Ce sera pareil avec les corsets et les pièces d'estomac (deux exceptions où c'est clairement la robe qui est fermé par les ganses). Est-ce la robe qui est liée-fermée par les ganses et la partie du dessus est est retenue en place par elles, ou le corsage est-il lié-décoré avec ? La première version me semble la plus logique, surtout que lorsque la taille est nouée d'une ceinture, ils utilisent aussi le terme "lié". Mais je n'écarte pas du tout la deuxième possibilité. L'art de la décoration vestimentaire en 1780 n'a pas de limite.
Magasin des Modes, Juin 1787
Magasin des Modes, Octobre 1787
Vous remarquerez aussi qu'un corsage peut se mettre aussi bien bien sous une robe à l'anglaise que sous un caraco-pierrot ou un robe-chemise. Autre point important : ils n'ont pas de basques. Ils n'ont pas non plus de forme standard au niveau de la pointe avant. Ce n'est pas un élément qui permettrait de les distinguer des corsets qu'on va voir ensuite.
Autres exemples de corsages:
Autres exemples de corsages:
Magasin des Modes, Novembre 1787
Magasin des Modes, Juin 1788
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"1. Sous-vêtement féminin, qui serrait exactement la taille et les hanches et affinait la silhouette 2. Anciennt. Sorte de corsage sans manches très ajusté, souvent lacé, qui se portait sur une blouse."Je ne sais pas comment souligner à quel point cette définition est mal adaptée. D'abord, quid des baleines ? On ne mentionne pas que le corset était un vêtement baleiné ? Et puis, laquelle correspond au corset moderne, laquelle au corset ancien ? Il faudrait les mixer un brin, et on serait quand même encore loin d'avoir une bonne définition.
C'est le problème avec le mot corset, c'est difficile à définir. Ca l'est encore plus au XVIIIe siècle. Pour moi un corset, c'est d'abord une pièce de vêtement baleinée dont le but est de conformer le corps. Lui donner une forme, un silhouette considérée comme belle ou socialement acceptable (gommer les bourrelets par exemple, souligner la taille, les hanches, la poitrine, etc.). Par ailleurs, le corset offre le soutien nécessaire au corps féminin. Et il conforme le corps pour une forme voulue par les critères de "beauté" de l'époque. Je n'aime pas beaucoup cette expression. Ce ne sont pas forcément des critères de beauté, plutôt que des critères correspondant à ce que le corps social a décidé être la forme correcte. Et accessoirement, le corset sert à resserrer la taille. Ou, je sais : accessoire ? Couper le souffle n'est pas le but premier du corset, par contre la recherche d'une silhouette parfaite en passe souvent par une taille resserrée. Mais ça ne signifie pas forcément qu'il faille opter pour le tight-lacing.
Au XVIIIe siècle, qu'est-ce qui correspond à cette notion moderne de corset ? Pas ce qui porte l'appellation "corset" en tout cas. Le problème, c'est qu'il existe beaucoup de types de "corsets" au XVIIIe.
Le nom correspondant à notre notion de corset est en fait appelée le "corps". Corps baleiné, Corps piqué, ou Corps de Cour selon l'usage. Au XVIIe, le Corps apparaît sous cette forme spécifique en tant que vêtement de Cour. La forme du Corps est décidé par décret par Louis XIV. Il est protocolaire (typiquement Versaillais). Il n'est pas "de mode", il est politique. Il ne bougera pas jusqu'à Marie-Antoinette qui réussira à en réduire partiellement l'usage parce qu'elle ne le supporte pas (physiquement). C'est un corset très baleinée, très douloureux et insupportable à porter sur le long terme (d'après tous les témoignages d'époque. A part la Princesse Palatine, personne n'aimait le costume de Cour). Par ailleurs, le Corps de Cour est un vêtement "extérieur". Il est fait pour se voir. (Deux exemples de Robes et de Corps de Cour)
Tout ça pour souligner que le "corps" de base au XVIIIe est un objet parfaitement artificiel qui n'a pas son équivalent dans l'Histoire de la Mode : aucune autre Cour n'a inventé un corps similaire (elles se sont contenté d'importé le corps de Cour français) et on n'a jamais inventé plus contraignant plus tard.
Le Corps baleiné (ou couvert) et le Corps piqué (la seule différence est que les coutures de baline du corps piqué sont visibles, d'après l'Encyclopédie Diderot et d'Alemebert) est son équivalent civil. S'il est beaucoup plus facile à porter, il reste complètement baleiné. A la différence du Corps de Cour, c'est un sous-vêtement, il est visible au début sous la Robe à la française, mais finit par devenir totalement invisible, caché par une pièce d'estomac.
Ces deux types de Corps sont caractéristiques des trois premiers quarts du XVIIIe, parce qu'ils sont très formels, et ils sont chers (longs et difficiles à fabriquer). On a des exemples plus populaires du Corps baleinés, mais ils sont souvent datables de 1750 au mieux. Ils sont aussi principalement dans des collections anglo-saxonnes.
(NB : Je n'ai jamais vu de Corps populaires dans des expos françaises. Il peut y avoir plusieurs raisons à ça : pas assez glamour (si c'est pas glamour, c'est pas assez bien pour être exposé en France), pas assez de pièces conservées, pas assez de connaissances, pas de pièces de qualité montrables, pas envie de dépenser de l'argent pour acheter des pièce "pauvres" pour les ajouter aux collections, etc. Aux USA, par exemple, la majorité des colons ne sont pas riches (et n'en ont pas honte) et les vêtements sont souvent importés, donc chers : on conserve plus longtemps par économie. En France, la mentalité est différente : les pauvres n'avaient pas forcément la même envie, ni le même besoin de conserver les vêtements. Par ailleurs, il y a la notion de memorabilia : on conserve des souvenirs par admiration pour l'époque vécue, ce qui colle très bien pour l'époque coloniale américaine. En France, on a conservé un nombre étonnant d'objets parfois tous simples liés à la Révolution, dans cette même optique. Mais pour le XVIIIe, il y a une focalisation sur les objets précieux.)
La question des Corps se diversifie pas mal sur la suite et lorsqu'on regarde dans l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert (1776), on trouve pas mal de Corps différents, dont celui pour femme enceinte et pour l'équitation. On y trouve aussi la première et peut-être la seule explication de ce que peuvent être les Corsets. Il s'agit du fameux corset blanc, non baleiné à l'exception de deux busc. Les buscs, en l'occurrence, ce seront des baleines du chaque côté de la fermeture avant (les buscs par définition sont toujours sur l'avant).
Il n'en précise pas l'usage. On ne peut donc que conjecturer sur l'usage du Corset en XVIIIe. Il est très utilisé en Provence, où le Corps, lui, est minoritaire. On peut au moins essayer de déduire de cette information qu'il est d'un usage répandu dans le peuple. En Provence, c'est aussi un vêtement visible, pas un sous-vêtement, comme le Corps. On peut supposer qu'il était utilisé en négligé par les bourgeoises et les aristocrates (le public de nos magazines de mode). S'il s'agit d'un vêtement de négligé, il était aussi un vêtement visible. L'Encyclopédie traitait de tous et pour tous, la présence du corset blanc dans ces pages n'est donc pas une indication d'un usage précis pour les couches supérieures de la société. Juste une indication que ce type de vêtement existe, ce qui ne nous avance pas énormément.
Il fournit aussi un patron de ce corset, et ce patron (fig 2, 3, 4, 5, 6, 7. Les figures 6 et 7 représente probablement le tissu extérieur du corset et le "patron", tel que l'intitule Diderot, est la doublure, fig 4 et 5) nous fournit un certain nombre de détails très intéressantes pour notre sujet : le corset blanc peut se lacer devant ou derrière et il a des basques caractéristiques (les languettes du bas qui seront découpées).
Donc, pour revenir à notre sujet, le corset blanc est ce qui semble correspondre le mieux au corset dont il est question dans les magazines. Sauf que Diderot mentionne aussi un autre type de corset, ce qu'il appelle un corset baleiné (fig 6), dont la vraie appellation est Corps demi baleiné. Si on le compare au Corps à baleines pleines (entièrement baleiné) juste à côté (fig 7), on remarque qu'ils ont exactement le même patron, c'est bien corps normal, pas un corset blanc qui serait baleiné. Il est "dit corset", ce qui signifie que dans le langage courant, un corset, ça peut aussi être ça.
Le problème est donc qu'en 1776, déjà, l'usage de Corset pour remplacé Corps a déjà commencé. En 1786, c'est beaucoup plus évident.. et beaucoup plus troublant pour le lecteur... Voici deux exemples où très clairement les mot Corset est utilisé à la place de Corps :
Le premier exemple est une robe de Cour ! C'est donc un Corps de Cours qui, en 1786 est qualifié de Corset. Il a des manche et des basques visibles comme le Corset Blanc. Les tassettes d'un Corps, l'équivalent des basques sur un Corps normal, sont en général dissimulées sous les jupes, au contraire de cet exemple.
Cabinet des Modes, Septembre 1786
Le second exemple fait même clairement allusion aux Corps mentionné dans l'Encyclopédie : un Corset à l'Anglaise, avec des manches d'une couleur différentes. Les différents Corps de Cour (il y a plusieurs types d'Habits de Cour) ont tous des manches même s'ils elles ne sont pas patronnées dans Diderot.
Il s'agit du Corps à l'Anglais (fig 1, 2, 3, 4, 9, 10, 11, 12). Il n'a pas la même forme que le Corps à la Française qui est les patron le plus utilisé par les reconstituteurs actuellement. Il n'a de toute évidence une forme aussi rigide qu'un Corps de Cour normal. Il est utilisé ici pour un Costume de Bal, et tout comme le Corset de Cour, n'est pas utilisé comme une pièce de sous-vêtement.
Au final, l'usage du mot "corset" est bien trop vaste pour prétendre le fixer. Si le Corset blanc et le Corset (demi) baleiné me semble les usages les plus crédibles pour les corsets que l'on va trouver sous les Robes à zone, je refuse d'exclure totalement les deux autres possibilités. Il ne faut pas non plus oublier que toutes ces définitions sont purement livresques. Dans les faits, les corsets que je connais, qui pourraient être utilisés sous les robes à zone, ne correspondent pas tout à fait à ces définitions : le Corset à manches rose de chez Villa Rosemaine, presque sans baleines (elles ont été retiré). On pourrait dans l'absolu le ranger aussi bien dans la partie corsage, mais la fermeture devant, pour moi, en fait un corset. Il ressemble à un Corset blanc, mais sans basques. Le Corset violet vu en salle des ventes chez Temps d'Elégance et le Corset rouge et blanc du Musée de Lyon .Ils présentent tous les deux des caractéristiques similaires : présence de basques, manches attachées, fermeture sur l'avant, pièce de devant entièrement baleinées, mais aucune baleine sur le reste du Corset. On peut, si l'on veut, les comparer avec un Corps entièrement baleiné à manches détachables (malheureusement modifié à la hussarde au XIXe).
***
Cet usage du corset sous la robe à zone a eu pas mal de succès. Très utilisé en 1786, il est oublié début 1787, pour revenir en force à la fin de l'année, jusque tout début 1789 où il est mis au placard. Si l'on peut considérer que le corsage a été un effet de mode qui a partiellement pris la place du corset en 1787, le corset, lui est un usage bien établi. C'est visiblement une pièce de vêtement assez utilisée dans les années 80. On peut aussi souligner que les années 80 sont les années de la révolution de la simplicité : si le corset est une pièce d'habillement négligé, comme l'était la robe-chemise, il n'y a rien de surprenant à ce qu'il devienne un pièce d'habillement normal à la même époque qu'elle.
Les corsets sont assez succinctement décrits et représentés. De ceux qui sortent du lot, on peut faire ressortir trois types principaux de corsets :
Un corset à basques visibles sur le devant. Les basques découpées ressemblent à celles du Corse blanc de Diderot, mais à part un exemple, les manches sont invisibles ou inexistantes. Sur les premiers exemples, la fermeture frontale me semble plus ou moins évidente (pour le premier, elle l'est).
Addenda : parfois, on oublie ce que l'on a sous son nez ! J'en connais, une fait, de robe avec un corset dessous. Elle est au Palazzo Mocenigo de Venise. J'en possède également des images trouvées sur le web dont je n'ai jamais pu retrouvé le/la photographe. Le corset, avec des basques comme les exemples suivants, est assortie au ruban de la robe, et est entièrement baleiné devant
Les corsets sont assez succinctement décrits et représentés. De ceux qui sortent du lot, on peut faire ressortir trois types principaux de corsets :
Un corset à basques visibles sur le devant. Les basques découpées ressemblent à celles du Corse blanc de Diderot, mais à part un exemple, les manches sont invisibles ou inexistantes. Sur les premiers exemples, la fermeture frontale me semble plus ou moins évidente (pour le premier, elle l'est).
Addenda : parfois, on oublie ce que l'on a sous son nez ! J'en connais, une fait, de robe avec un corset dessous. Elle est au Palazzo Mocenigo de Venise. J'en possède également des images trouvées sur le web dont je n'ai jamais pu retrouvé le/la photographe. Le corset, avec des basques comme les exemples suivants, est assortie au ruban de la robe, et est entièrement baleiné devant
Cabinet des Modes, Septembre 1786
Magasin des Modes, Décembre 1788
Magasin des Modes, Février 1788
Magasin des Modes, Octobre 1787
Même gravure reprise tout pile un an plus tard.
La description a changé, mais l'ouverture frontale est toujours visible.
Cabinet des Modes, Août 1786
Magasin des Modes, Février 1788
(Précisions : c'est un gilet, il se ferme forcément par devant.
Le laçage derrière est certainement un moyen d'ajuster le gilet)
(Précisions : c'est un gilet, il se ferme forcément par devant.
Le laçage derrière est certainement un moyen d'ajuster le gilet)
Des corsets au manches de même couleur que le corset (et de couleur différente de la robe) -- en ne prenant en compte que ceux qui mentionnent clairement que les manches appartiennent au corset. Pas de basques, pas de mention de la fermeture devant ou derrière. Seule particularité : les manches peuvent en être longues. C'est la première fois que je vois des corsets associés à des manches longues. J'aurais tendance à rapprocher ces exemples-là des corsages mentionnées plus haut.
Magasin des Modes, Octobre 1787
Magasin des Modes, Décembre 1787
Magasin des Modes, Février 1788
Magasin des Modes, Avril 1788
(Le retour de la robe-chemise à zone)
Cabinet des Modes, Novembre 1786
Je remet cet exemple, puisqu'il possède des manches assorties
Un autre corset, mentionné une seule fois, est intéressant : il a des manches, est "busqué (...), lacé avec un ruban orange, formant la pièce par devant". Ce qui veut dire qu'il y une pièce d'estomac, en plus du corset. Il ressemble donc beaucoup à un Corps traditionnel comme celui cité précédemment, autant qu'il peut ressembler à un caraco simple se laçant sur une pièce d'estomac.
Magasin des Modes, Janvier 1788
Cabinet des Modes, Janvier 1786
Cabinet des Modes, Mars 1786
Cabinet des Modes, Juin 1786
Cabinet des Modes, Juin 1786
Cabinet des Modes, Juin 1786
Cabinet des Modes, Juillet 1786
Magasin des Modes, Septembre 1787
Magasin des Modes, Mars 1788
Magasin des Modes, Septembre 1788
Magasin des Modes, Février 1789
(Maya L'Abeille ! hum... pardon...)
***
Les pièces sont rares en 1786 et 1787, mais très fréquentes en 1788 et omniprésentes en 1789, où elles ont remplacées tout le reste. On peut essayer d'y voir un retour vers la simplicité, avec des pièces d'habillement moins encombrantes, moins de tissu à utiliser, etc.
Dans quelques cas, les manches sont assorties à la pièce d'estomac : en toute logique, soit le vêtement est tout d'une pièce, pour éviter le risque de dépareiller la pièce, ou ce n'est pas vraiment une pièce mais un corset à manches. Il est même mentionné une fois qu'il est possible d'interchanger pièce et corset. Il est donc évident que dans ces cas-là, la partie de dessous est amovible.
Je dirais également que les pièces qui sont retenues ("liées", "lacées") par des rubans ou des ganses, sont de vraies pièces d'estomac amovibles. C'est ce qui me semble le plus logique. (Je parle ici des pièces où le laçage est mentionné dans le texte, dans deux des exemples précédents, ils n'est pas décrite, mais visible sur les gravures. Cela peut-être un ajout du graveur.)
Magasin des Modes, Juin 1788
Magasin des Modes, Juillet 1788
Magasin des Modes, Août 1788
Magasin des Modes, Décembre 1788
Magasin des Modes, Janvier 1789
Cabinet des Modes, Décembre 1785
Magasin des Modes, Juillet 1786
Magasin des Modes, Mars 1788
Magasin des Modes, Mars 1788
Magasin des Modes, Avril 1788
Magasin des Modes, Juin 1788
Magasin des Modes, Juin 1788
(La pièce est ici détachable puisqu'elle est, comme un corset, amovible)
(La pièce est ici détachable puisqu'elle est, comme un corset, amovible)
Magasin des Modes, Août 1788
Magasin des Modes, Octobre 1788
Magasin des Modes, Octobre 1788
Magasin des Modes, Novembre 1788
Magasin des Modes, Décembre 1788
Magasin des Modes, Janvier 1789
Magasin des Modes, Mars 1789
Magasin des Modes, Mars 1789
Magasin des Modes, Mars 1789
Magasin des Modes, Juin 1789
Magasin des Modes, Juin 1789
Magasin des Modes, Juillet 1789
Magasin des Modes, Juillet 1789
Magasin des Modes, Août 1789
Magasin des Modes, Octobre 1789
(oui, il se sont trompés sur la couleur)
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***
Si vous êtes arrivés à la fin de cet article, félicitations !
Je voudrais rappeler en conclusion que ces données sont exclusivement extraites de magazines de modes, et donc à traiter avec la distance nécessaire. On ne peut pas utiliser au pied de la lettre de telles information, et les comparaisons que j'ai essayées de dresser avec des vraies pièces d'époque montre à quel point le gouffre entre les sources écrites et la réalité pouvait être important. Néanmoins, sur le fond, l'analyse de ces documents dessine en partie les habitudes de l'époque, et en cela est, à mon avis, un outil indispensable.
En tout cas, moi, maintenant, j'ai vraiment envie d'essayer de créer une robe à zone par dessous un Corset blanc :)
Ps : cette recherche m'a pris beaucoup BEAUCOUP de temps et d'énergie, pitié, ne vous appropriez pas mon travail. Citez-moi, et linkez vers ce post et le précédant. Merci d'avance.
Bonjour!!!
RépondreSupprimerC'est vraiment un article très intéressante, j'y est appris beaucoup de chose, merci! j'ai en cours un petit projet de réalisation d'une robe à l'anglaise et vous pourriez peu être m'aider...
je suis aller jeter un coup d’œil a votre patron en japonais, par Janet Arnold, et puisque vous le proposez si gentillement j'avoue que je serais très intéressée si vous pouviez en poster la traduction!
Et encore un grand merci pour ce blog qui est une véritable source d'émerveillement et d'enrichissement pour les amoureux du costume!
Un grand merci par Avance
Merci pour les compliments :) Ça fait toujours plaisir de savoir que ce blog peut être utile.
RépondreSupprimerEn ce qui concerne la traduction, je précise qu'il n'y a pas description du costume fournie avec le patron, seulement une légende correspondant à chaque numéro sur les pièces de patron, ça peut être très succinct. Comme je fais de ma mémoire et à l'aide de mon japonais très basique, il y a des trous dans la traduction, désolée.
1) mousseline couleur ivoire, 2) la mousseline ivoire s'arrête ici, 3) satin de soie ivoire, 4) doublure, 5) ligne de couture de la manche, 7) manche supérieure en mousseline ivoire, en haut, des petits plis, 8) ? , 9) un petit pli , 10) & 11) là où les manches sont attachées au corsage (je résume de mémoire,,le texte japonais est incompréhensible) 12) baleine (?) , 13) ligne de couture de la manche 14) ? , 15) la jupe (plus le dos puisqu'ils sont coupés d'une seule pièce) est faite de satin de soie ivoire couverte de mousseline ivoire, mais seule le satin va jusqu'à 15, la mousseline s'arrête à 16, 17) est je pense une couture pour la,mousseline ( pas clair), 18) pas une couture : tissu à couper sur la pliure.
Voilà, j'espère que ça vous aidera et bonne chance pour votre robe à l'anglaise !
Merci! Merci!!!
RépondreSupprimerJe pense que cela devrait pouvoir m'aider un peu ;-)
Allez je me lance!
Si c'est réussis j'envoie des photos!
Au plaisir de lire de nouveaux articles!
Bientôt
Super article :)
RépondreSupprimerCa tombe pile dans mon questionnement du moment ! ...bon, il faudra que je lise tout ton article à tête reposée pour être sûre de tout comprendre...
Les quelques éléments dont je suis convaincue :
- le corsage peut se fermer sur le devant, dans ce tableau, on voit clairement qu'il y a une fermeture camouflée au milieu du devant, non ? http://pinterest.com/pin/233272455668757384/
- les rubans ne servaient pas forcément à fermer la robe du dessus. Là ça se voit bien :
http://pinterest.com/pin/233272455669081994/
PS : désolée si on n'a pas le droit de citer des tableaux ^^ j'y connais rien en méthodologie de recherche en histoire de la mode.
@Estherelia :
RépondreSupprimerRavie de pouvoir aider ! Encore une fois bon courage pour la robe. Je serais ravie de voir le résultat.
A bientôt !
@cicile :
RépondreSupprimerMerci !
Petite précision sur l'article : il n'est pas censé être exhaustif sur le sujet pour plusieurs raisons :
-- je me suis concentrée sur un nombre d'année réduites (4 ans) et seulement 2 magazines.
-- il ne concerne que le traitement du sujet dans les journaux de modes. Comme je le dis à l'article précédent (Dimanche Investigation (I) ), le magazine de mode est, comme toutes les sources, une source qui a ses limites, ce qu'il ne faut pas perdre de vue.
-- je n'ai pas fait de comparaison avec les costumes réels (j'ai seulement donner des exemples) et bien sûr je n'ai pas traité les peintures. Si j'avais développer tous ces point, l'article ferait probablement 35 pages ! Et surtout il aurait fallu soulever tout un tas de précisions annexes, mais essentielles.
Par exemple, la peinture. Non, il n'y a pas de mal à utiliser les tableaux pour analyser l'histoire de la mode :) Par contre, il faut les analyser avec une méthode d'historien. Les gravures de mode concernent la mode. Les peintures, elles, ne traitent le sujet que de manière subsidiaire. Le sujet, c'est la personne qui est peinte, l'objectif de l'artiste (le message qu'il veut transmettre) et l'objectif de la personne représentée (ce qu'elle que l'observateur du tableau pense d'elle). Il y a donc une manipulation voulue de l'image. Modifier un costume, pour correspondre à un idéal, peut participer de ce mouvement. Autre point important, un peintre va faire preuve de ses talents, dans sa technique, et le vêtement est souvent le moyen pour le faire. Il vont accentuer les draperies, rajouter des dentelles qui sont extraordinairement compliquées à peinder, etc. Cela ne veut pas dire que ces éléments ne doivent pas être pris en compte, mais ils doivent l'être avec un esprit critique qui prend en compte les éléments précisés plus haut. Dernier point : un peintre ne s'y connait pas forcément en mode. Il peut donc, en toute bonne foi, représenter n'importe comment un costume dont il n'a pas compris la construction. Je rappelle aussi que beaucoup de portraits sont composés à partir de dessins préparatoires et non avec la personne qui pose tout au long de la composition. La mémoire du vêtement est donc forcément trompeuse, ce qui peut expliquer certaines erreurs.
(to be continued)
Deuxième point, qui rejoint lui aussi les exemple que tu donnes : j'ai traité uniquement des robes à zone, et non des "vraies polonaises". Or l'exemple que tu donnes est une "vraie polonaise", pas une zone. On les reconnait au fait que les pans de zone sont flottants, ils ne sont pas fixés au niveau de la taille. Les polonaises fonctionnent à priori avec une pièce d'estomac. Je dis à priori car on ne possède presque rien pour affirmer cela. Je n'ai jamais trouvé de texte qui explicite ce qui se porte sous une polonaise, et l'on n'a (disponible pour ceux qui ne travaillent pas dans les musées comme toi et moi) que deux exemples de polonaises qui possèdent encore leur partie de devant et à chaque fois, c'est une pièce d'estomac. Ton exemple est intéressant : ça ressemble à une fermeture frontale. Cela peut aussi être une simple couture. J'aurais tendance à ajouter que c'est peut-être seulement un choix graphique de Romney, parce que la pièce blanche sans ce trait au milieu qui rajoute des ombres, ne fonctionnait pas avec le reste de la peinture (les surfaces blanches, c'est très casse-gueule en peinture).
RépondreSupprimerPour les rubans (par rapport à ton deuxième exemple), encore une fois, mon affirmation n'est liée qu'à ce qui est affirmé dans les magazines. Ce n'est pas mon opinion, juste ce que j'ai cru dégager. Et comme cette analyse est volontairement limitée aux magazines, je n'ai pas pris en compte les sources extérieures qui pourraient infirmer cette affirmation. Il est possible, bien sûr que les rubans ne soient que décoratifs, mais tu remarqueras qu'ils sont de la même couleur que la robe : soit la robe n'est portée qu'avec cette pièce d'estomac, ce qui limite l'intérêt d'avoir une pièce plustôt qu'un corsage ou un corset, soit le peintre a pris des libertés avec la réalité. Dans ce cas-là, pour confirmer ta première idée, il vaut mieux chercher un autre exemple de ce type pour asseoir ton opinion (ce qui serait formidable si tu le trouvais !). J'ai tendance à penser qu'en Histoire (de la mode ou autre), il vaut mieux avoir deux mentions minimum du même fait pour qu'il puisse commencer à être considéré sérieusement).
mmmmhh voillà, je parle beaucoup, mais j'aime bien et le sujet de l'article (sinon je l'aurais pas écrit !) et le sujet de l'analyse de documents historiques :))) J'espère en tout cas que ça peut t'aider un peu pour tes diverses interrogations.
(Excuse-moi pour les divers fautes d'orthographe, j'ai les yeux qui se croisent ce soir...)